Ernest Becker - Escape from evil (notes in french)

jsf

Jedi Master
There is very little in french on Ernest Becker. Apparently none of his books have been translated, (The birth and death of meaning; Revolution in psychatry; Angel in armor; The structure of evil; The denial of death; Escape from evil).

Il n'y a pas grand chose en français sur Ernest Becker. Apparemment aucun de ses livres n'a été traduit. Il y a également peu de choses sur le net :

There is also very little in the web.
See :
_http://fr.wikipedia.org/wiki/Th%C3%A9orie_de_la_gestion_de_la_peur
_http://ralentipoli.blogspot.fr/2012/11/ernest-becker-biographie-du-pere-de-la.html
More details :
_http://encyclopedie.homovivens.org/documents/ernest_becker_etre_par_la_mort

It's a pity, his ideas are undeniably powerful. So here are my notes :

C'est bien dommage, ses idées sont indéniablement puissantes. Voici donc mes notes :

En quelques mots, "Escape from Evil" explique que l'organisme (le corps) est programmé pour s'étendre, pour augmenter son pouvoir, il est prédateur. Donc l'homme est profondément poussé à se mettre en avant, et pour ce faire, il doit contrôler le monde, contrôler le mal, et la mort (en devenant un "héros"). Le noeud de l'affaire est donc la peur de la mort, de l'annihilation.

Mais ce gonflement de l'égo n'est pas sans conséquence, l'homme premier devait après se mettre en arrière (par culpabilité, par respect de la structure sociale, par repentance/expiation, etc). La société, la culture, la religion, bref toutes les structures idéologiques basées fondamentalement sur le rituel, servent à "fabriquer des héros". Il y a donc dès le début un système binaire, qui encourage des autorités extérieures, et des populations qui se mettent en dépendance/soumission volontaire pour profiter de la "protection divine" des autorités.

Notes :

2 - "chaque organisme sort la tête d'un champ de corps, sourit au soleil, et déclare que la vie est bonne" / vivre c'est la prédation
3 - quel est le rêve de l'organisme ? une expansion illimitée. (paradis musulman : tous les esporis du corps) / l'organisme veut laisser sa trace sur terre
5 - l'homme veut vivre dans une illusion mais cette illusion a un prix : il répand la destruction
6 - l'humanité a toujours cru pouvoir contrôler la vie. On peut en rigoler mais par la magie ou la technologie c'est le but
8 - les rituels sont une technique pré-industrielle de contrôle de la vie
9 - début de la passion à tout diviser en opposés polaires (yin yang, binaire) -> Organisation sociale primitive de l'homme
11 - l'organisation duale est nécessaire au rituel
13 - l'homme cherche à gonfler son égo : la société avec ses codes lui en offre la possibilité (humilier, se vanter, mettre en avant ses accomplissements, etc)
14 - la société offre la "sensation de soi organismique" par ses codes qui comparent les réussites, vertus, etc, en huilant les conflits pour pouvoir quand même vivre ensemble
16 - sans la "connexion cosmique", le rituel ne permet plus à l'homme de se sentir aussi important. Dans la société moderne c'est seulement le patron ou un passant qui peut donner ce sentiment "d'importance de soi"
20 - pour contrôler la nature l'homme doit expulser le mal, la maladie et la mort. Le rituel triomphe contre le mal
22 - toutes les cultures sont basées sur l'estomac. La recherche de nourriture est devenue la quête d'excellence spirituelle, de bonté et de pureté
23 - mélanger l'estomac et la spiritualité n'est pas une bonne idée. Pour la plupart des hommes la spiritualité est le "projet organismique de l'estomac"
24 - l'homme primitif n'était pas plus "gentil" envers la nature que nous, mais il avait des techniques de manipulation moins destructrices / il respectait les parties de la nature qu'il ne contrôlait pas, mais dès qu'il les a contrôlées il a cessé d'y voir du mystère
26 - comment expliquer le début de la création d'un "surplus" ? Pourquoi l'homme s'est mis à travailler plus que nécessaire ? -> C'était pour nourrir les dieux
27 - les systèmes sociaux archaïques étaient basées sur l'échange de cadeaux
28 - l'homme premier était redevable aux dieux. Il devait donner quelque chose à l'invisible pour que l'invisible féconde toujours le visible
34 - être favorisé dans sa réussite est mal vu
35 - trop se détacher de la communauté est mal vu -> c'est pourquoi on coupe les têtes, pour prendre le "pouvoir" des têtes (pouvoir vital, mana)
36 - celui qui se met en avant et a du pouvoir doit en faire profiter les autres ensuite : sentiment de culpabilité, de dette. Le héros cherche à accumuler pour ensuite pouvoir donner et se défaire de sa culpabilité (don aux dieux, sacrifice, etc) /
Deux faces de l'homme : héroïsme et repentance, prestige (hubris) et expiation
39 - peu importe les révolutions dans l'histoire, on remet toujours un état en place / la tradition marxiste n'a pas résolu la question de l'inégalité entre les hommes
41 - dès le début les hommes étaient inégaux entre eux : raisons personnelles, psychologiques de l'inégalité
43 - sociétés stratifiées : pourquoi les a-t-on "laissées" se développer ? qu'est-ce qui dans la nature humaine les a favorisées ? Raison : dès le début il y avait une inégalité, certains hommes avaient des privilèges spéciaux en raisons de leurs talents -- ce qui indiquait une puissance de durabilité ou d'immortalité [victoire sur la mort] / Rousseau ne voyait pas que nous naissions avec un besoin d'une autorité, nous créons notre propre prison
44 - première division de classe entre hommes mortels (pouvoirs faibles), et hommes "immortels" surhumains (grand pouvoir)
45 - pour l'organisme, le monde entier est structuré en termes de pouvoir [Nietzsche, Hobbes]
46 - mana = pouvoir, tabou = danger, attention (à cause du pouvoir)
47 - premier détenteur du pouvoir : chaman, homme médecine
48 - Becker cite Radin ("The Crises of Life and Their Rituals"), qui montre que les hommes âgés voulurent retenir le pouvoir, et maintenir les femmes en sujetion, ils durent inventer des systèmes mystiques
49 - le mal est à la base neutre, il dérive de la "robustesse organismique" / la tradition marxiste n'a pas pris en compte le caractère *sacré* des distinctions de classe
50 - phénomène du transfert : l'homme s'impose lui-même ses chaines, il est prêt à se soumettre avec plaisir, il s'aliène volontairement (que ce soit aux esprits ou aux autorités politiques)
51 - l'homme est "hypnotisé par ceux qui représentent la vie" (les pouvoirs, les autorités)
52 - pourquoi passer d'une économie d'échange simple à une économie centralisée autoritaire ? -> L'homme voulait une figure d'autorité *visible*. Il voulait un dieu "visible" à qui offrir des cadeaux
53 - L'homme voulait voir Dieu satisfait de lui. Les juifs étaient moqués pour leur dieu invisible, par rapport à la splendeur visible du Pharaon
54 - l'Homme Solaire, les rois divins représentant le soleil. Solarisation de l'homme
55 - l'homme espérait autant des rois solaires que l'homme espère maintenant des ordinateurs ou réacteurs nucléaires
57 - les chefs cherchaient à tout faire rentrer dans la sphère du rituel = leur propre sphère d'influence. Coutumes sociales deviennent sacrées. Si les récoltes étaient bonnes les hommes étaient prêts à supporter la tyrannie
58 - les hommes ont donc accueilli l'ascendance sur eux de dieux visibles, et donc l'étape logique est d'accepter la punition des agents de ces dieux
59 - On voit dans l'histoire un déplacement de la dépendance au monde invisible à une dépendance au monde visible des choses
61 - oubli de l'invisible : autorités de plus en plus matérielles et non spirituelles. Les Carnegie, Rockefeller, etc, amassent et accumulent des biens, mais ne cherchent plus à "expier". Ils ne rendent rien en retour au public. Héroïsme sans repentance!
62 - les rituels d'autrefois donnaient beaucoup plus d'importance à chaque membre d'un clan, chaque famille. Dans la société moderne les hommes indifférenciés font directement face à l'autorité (Etat, le Pape, le président, le premier ministre, etc). Les hommes "normaux" ont perdu leur propre pouvoir (avec la perte de leur rôle dans les rituels)
63 - l'homme en tant qu'organisme biologique conscient de sa finitude construit un système pour s'assurer de sa longévité, pour transcender la chair et les os, pour devenir immortel, impérissable. Il construit donc un "projet" pour s'assurer de son immortalité spirituelle
64 - la société valide un projet dominant, une idéologie "d'immortalité" / doctrines pour faire durer l'égo / l'homme met toute son énergie dans une illusion, un mensonge, et il se battra pour le défendre : si un adversaire est en désaccord sur un point mineur de sa croyance, il doit mourir. [parce que s'il a raison, il nous renvoie à notre mortalité]
L'histoire peut être comprise comme une succession d'idéologies pour contourner la mort : de sorte que *toute culture est par essence sacrée* (la culture cherche la perpétuation et la rédemption de la vie individuelle)
65 - la culture d'un groupe garantit l'immortalité, on comprend pourquoi l'homme est prêt à se renier lui-même, à accepter les limitations sociales, à restreindre ses appétits = le groupe donne l'expression au plus important des appétits, la faim de faire perdurer la vie / L'homme pense obtenir "plus de vie" en niant la vie (par des tabous, morales, coutumes, lois...) : Les hommes veulent davantage préserver leur immortalité que leurs vies
66 - la famille patriarcale devient la règle : le père a des droits tyranniques sur la famille, famulus = serviteur, esclave
67 - l'enfant devient le successeur de son père, l'enfant est JUSTE le "fils de son père", il permet la lignée spirituelle dans lequel son père peut se perpétuer
69 - le christianisme primitif était une tentative de retour au paganisme, en donnant plus de pouvoir aux individus en particulier. Démocratisation du pouvoir spirituel, décentralisation. Nouvelle forme de renouvelle de soi magique, universelle, démocratique.
70 - le christianisme a échoué dans son désir de ré-instituer la communauté sacrée primitive, de même la Réforme a échoué
72 - L'idéologie moderne de la démocratie a pareillement échoué : elle a simplement répété les erreurs de Rome et du christianisme, elle n'a pas éliminé les inégalités économiques
73 - Becker cite Norman O. Brown ("Life against Death"), qui utilise le même principe qu'Otto Rank : le besoin universel d'immortalité. Ce principe sacralise les coutumes sociales
74 - l'or devient sacré, car il est garant du pouvoir, il permet d'acheter "plus" de "vie" : vêtements, armes, chevaux, monuments, etc, tout peut être acheté avec l'or, il permet à l'égo de laisser sa trace. L'or est devenu le nouveau symbole d'immortalité
75 - l'argent est la nouvelle possession "totémique". Argent = esprit totémique, garant du pouvoir. Avec la fin des rituels du monde ancien, l'homme avait besoin de nouveaux rituels, l'argent vient combler le manque
76 - l'argent est donc sacré. C'est du "pouvoir sacré". De même que l'argent était avant coquillages, dents d'animaux, plumes, etc : il contient une "puissance vitale"
77 - monnaie : or + symbole. Pouvoir transféré à l'or, pouvoir de l'amulette transféré au métal, pouvoir des dieux se trouve dans le métal
78 - Hocart explique : parallèle entre monnaie en or = symbole de la couronne, du halo, du disque solaire
79 - les premières banques étaient les temples et les prêtres frappaient la monnaie. Les prêtres étaient payés par de l'or pour intercéder avec les pouvoirs invisibles.
81 - Les coutumes sont sacrées... pourquoi la monnaie devrait être une exception? Quand il y a "pouvoir", on est dans le domaine du "sacré". Le pouvoir permet de s'étendre (de gonfler l'égo), d'échapper à la finitude, l'impuissance, et prendre en contrôle, en durabilité, en importance
83 - il n'est pas juste de dire "monnaie = Dieu", mais plus exact de dire, "la monnaie permet de négocier son immortalité et donc est Dieu"
85 - le symbole du Diable représente ce qui est terrestre, physique, -- donc ce qui s'oppose au projet d'immortalité éthéré, au pouvoir spirituel
86 - le christianisme primitif est une des rares idéologies a avoir préservé l'idée d'un monde invisible, et de son importance dans l'immortalité. Il pose donc un danger pour toute idéologie unidimensionnelle (qui accordent de l'importance aux symboles visibles de classe, prestige de race etc)
87 - les peuples premiers vivaient dans un temps cyclique, il a fallu passer à une cosmologie de temps linéaire pour favoriser l'accumulation des biens (pas de renouvellement saisonnier)
88 - la notion de "péché" nait de la tension entre le visible et l'invisible, avec l'accumulation des possessions. Péché = être séparé du pouvoir et de la protection des dieux. Péché = ne plus être sûr d'avoir la bonne connexion, le bon moyen d'expier. Péché = se sentir seul, affligé par le poids de la physicalité
89 - le problème de l'argent est qu'il ne permet pas l'expiation. Le monde moderne nie l'invisible, alors il nie le péché. On a fait table rase du péché. On ne peut pas non plus se repentir par le travail, car la création d'un surplus ne peut plus être offerte aux dieux. Le dieu argent ne permet pas l'expiation, il est pervers!
91 - Bien que Reich et Jung soient différents, presque opposés, ils partent d'un même constat sur le mal. Rank dit : désir de l'homme de dénier sa mortalité, son côté animal / peur de la vie et de la mort = naissance du mal.
Reich dit : homme qui veut être autre chose que lui-même, qui veut dénier sa nature animale = naissance du mal.
Jung dit : l'homme veut se dissocier de son ombre, et l'ombre est l'infériorité, la créature, qu'il veut dénier = naissance du mal.
98 - la colère du peuple contre ses dirigeants ne peut pas être exprimée, alors elle est redirigée vers des bouc-émissaires. Cela diminue les tensions de la civilisation. La guerre devient une soupape de sécurité
101 - frustration envers tyrannie -> guerres. Mais la guerre a une autre fonction -> permet aussi d'expier la culpabilité.
103 - la guerre ré-emplit mystiquement la vie (idéologie nazie)
105 - la guerre permet de tester la volonté des dieux, voir s'ils sont toujours en notre faveur, la guerre est une sorte de divination / la guerre permet de dire qu'on est "peuple choisi", qu'on est élu / le héros est "élu par les dieux", il reçoit la faveur des dieux
106 - les hommes se sacrifient pour s'assurer qu'ils ont toujours la faveur des dieux
109 - la guerre est un rituel visant à fabriquer des héros, à "ennoblir"
110 - tuer les autres permet d'affirmer sa propre vie (son égo) / arènes romaines / assister à la mort d'un autre apporte le plaisir de se sentir toujours en vie et sécurité
111 - importance de l'humiliation et exécution publique de prisoniers, "ils sont faibles et ils meurent, nous sommes forts et nous vivons"
112 - il faut punir ceux qui n'ont pas le même "projet d'immortalité" que son groupe, ils faut prendre leur force vitale = génocides.
113 - la nation et ses alliés est garante de sa survie éternelle ("peuple élu"). Tous ceux qui sont différents et en-dehors de cette bannière sont exclus de l'accès à l'éternité / [exemple : "quelqu'un a d'autres coutumes et a la faveur de dieu ? alors j'aime pas ça, ça veut dire que mes coutumes ne reçoivent pas la faveur de dieu. Comment qq d'autre peut être mon égal dans les yeux de dieu ? S'il a raison, j'ai tort. Je pense qu'il cherche à rouler dieu avec ses manières étranges. Allons le provoquer, allons lui montrer qu'il n'est pas fort"]
114 - si on a le destin des autres entre ses mains, on a l'impression d'être maître de la vie et de la mort. Mais dès qu'on en perd le contrôle, alors quelqu'un d'autre prend le contrôle de soi
115 - le groupe-la société doit désigner des victimes / toutes les guerres sont "saintes" : révélation du destin, test de la faveur divine, et un moyen de purger le mal du monde / quiconque n'est pas satisfait de lui-même est prêt à se venger sur quelqu'un d'autre -> le pb c'est que les hommes sont jamais entièrement satisfaits d'eux-mêmes, ils se sentent toujours plus ou moins coupables, ils cherchent à se purifier et se nettoyer en s'attaquant au "mal" et au "sale" dans le monde
116 - la recherche de perfection reflète le sentiment d'imperfection des hommes / il est vital pour les hommes de savoir s'ils sont aimés ou non, leur vie éternelle dépend de la validation et de l'appréciation du groupe
117 - Travaux de Burke, Duncan, Mumford, et Lifton : intéressants mais se trouvent déjà chez Otto Rank (explication de cohésion sociale type Hitler, Staline, Mao). "Victoire héroïque contre le mal" pour diminuer son propre sentiment de culpabilité
119 - "la civilisation, la naissance de l'Etat, du royaume, les religions universelles -- toutes sont nourries par la même dynamique psychologique : la culpabilité et le besoin de rédemption". / Avant c'était Dieu, maintenant ce sont les SS ou la CIA, mais l'individu cherche toujours à se donner en tremblant humblement à son ancêtre totémique. Les motivavations sont toujours les mêmes : les peurs et espoirs de l'individu
120 - concerts de musique comme triomphe des forces de vie, communion dans la joie, victoire sur les limitations humaines / dissociation
121 - expansivité, joie héroïque ont un envers : la finitude, la culpabilité, la mort / victoire héroïque comme affirmation de la vie, mais elle porte aussi la racine du déni de la mort, du déni du corps physique ici sur terre
122 - regard des autres : nécessaire car être apprécié par le groupe signifie être admis dans leur "immortalité" /
IMPORTANT : L'héroïsme est une activité épuisante pour conformer le monde à nos désirs. Nous sommes des animaux insignifiants et impuissants qui voulons contrôler l'univers, à le contraindre à nos pulsions. L'homme est un animal qui, pour vivre, doit vivre dans un mensonge.
Si l'homme a peur de n'être qu'un corps, un égo, alors l'égo qui veut survivre cherche à détruire tout ce qui n'est pas lui.
Si les choses sont ainsi, alors -quelqu'un doit payer pour ça-.
c'est le Diable, il représente le corps.
123 - Le diable est aussi le vampire, c'est pourquoi on tient la croix contre le vampire. L'esprit (compris comme égo) doit vaincre le corps, vaincre la mort.
124 - L'effort de renforcer son égo, son importance, son pouvoir "spirituel", suppose de croire en un mensonge, et cela a un coût. Cela implique aussi de croire en une société, puisque toute société est un système héroïque qui promet la victoire sur le mal et la mort. Cela suppose des bouc-émissaires. Les sociétés comme les religions ont leur lot de boucs-émissaires. Leurs mystifications sont toutes aussi mauvaises.
125 - la sociologie = l'étude du mensonge, la révélation du mensonge
l'étude comparée des sociétés = l'étude du coût des mensonges
Deux coûts : tyrannie interne à la société, victimes externes (étrangers, ennemis du dehors)
126 - comment une victoire héroïque peut-elle être autre chose qu'une fabrication narcissique de boucs-émissaires ? Il faut inventer un système social non destructeur *et pourtant victorieux*. Il faut trouver comment remplacer la guerre par quelque chose qui a la même fonction.
131 - La liberté n'est pas la condition de base de l'homme. Aucun n'homme n'est libre par défaut. Rares sont les individus qui *atteignent* la liberté après des années d'expérience et d'effort
132 - dans la société tribale, le peuple tue le chef s'il le souhaite. dans la société tyrannique moderne, le chef tue le peuple s'il le souhaite
A chaque fois, quelqu'un doit payer parce qu'il n'a pas résolu les problèmes qu'on lui a donné
133 - problème de la nature de l'homme : est-il bon et la société le corrompt-il, ou bien est-il mauvais et la société l'améliore ?
(même question que exo/endosquelettes moraux).
Becker y a réfléchi des dizaines d'années, avant de comprendre qu'il lui manquait un élément : l'organisme est "programmé" pour développer l'égo, le narcissisme. Il est programmé sur le mode de la prédation.
134 - ce qui cause le plus de morts : la "dévotion altruiste" à une autorité, l'hyper-dépendance combinée à la suggestibilité (référence à Arthur Koestler)
135 - Becker cite Erich Fromm : selon Fromm les gens vénèrent des héros parce qu'ils ont pas eu la possibilité de devenir autonomes et indépendants. Nikolai Mikhailovsky, sociologue russe, dit pareil.
Mais quelque chose manque dans ce raisonnement, comme pour Rousseau, il ne prend pas en compte la "faim" de l'homme pour sa propre expansion et perpétuation [esprit du prédateur]
136 - Finalement, le mal vient du désir de l'homme de vaincre le mal (vaincre sa vulnérabilité).
Les souffrances intolérables de l'humanité résultent du fait que l'homme veut que la nature toute entière reflète SA réalité, sa victoire héroïque; il veut atteindre la perfection sur terre, prouver son importance cosmique
Il veut étendre les valeurs de sa sphère limitée à tout le reste de la création. Il doit nier la peur qu'il est vraiment impuissant et qu'il n'a pas d'effet sur le monde.
L'homme n'est pas sûr de lui, il manque d'estime de soi
137 - le "mal" est inscrit dans la vie sociale car "toutes les interactions sont des appropriations mutuelles". Ex : les gourous se nourrissent des disciples et inversement, la vie sociale ressemble à un film d'horreur, de science fiction, tout le monde essaye de se bouffer comme des araignées
138 - les dictateurs sont une chose, mais c'est la foule qui attend avant tout un sauveur qui va les aider de manière magique. La foule donne du pouvoir aux dictateurs car elle veut se soulager du conflit et de la culpabilité
139 - les gens veulent des leaders pour avoir un peu de leur rayonnement, transcendance, pureté
besoin général de l'homme : besoin d'estime de soi
140 - Fromm classe les gens qui ont peur de la vie et qui veulent tout contrôler dans les "nécro-philes", ceux qui aiment la mort, par opposition aux "bio-philes", ceux qui aiment la vie.
Mais selon Becker il serait plus juste de classer les gens qu "aiment la mort" en "ceux qui atteignent leur immortalité par l'identification au pouvoir des machines", c-a-d la mécanicité, l'attirance en la tranquillité de la mort. Les machines ont un pouvoir qui transcende la vie et la mort.
144 - Becker voit un espoir dans le fait que si la haine n'est pas la principale motivation [dans le pb du mal] et que c'est la peur de la mort qui conduit à la haine, alors on peut réfléchir sur le problème de la peur.
145 - les "objets sur lesquels porter la haine" pourraient être des causes abstraites plutôt que d'autres humains [agir contre la pauvreté, l'oppression, les catastrophes naturelles, les ennemis de la liberté, les faiblesses égotiques, etc]
Il y a un espoir à transformer l'expansion égotique de soi -- favoriser la vie et non finir par détruire la vie
148 - "fétichiser le mal" = chercher à localiser le mal qq part pour pouvoir le contrôler. Les hommes imaginent le mal aux mauvais endroits, et détruisent les autres et eux-mêmes de la sorte. Ex Moby Dick qui confine le mal dans la baleine blanche
151 - le mal vient du désir de vaincre le mal. (enfer pavé de bonnes intentions etc) L'homme est un animal impuissant qui ne veut pas admettre sa propre impuissance, sa vulnérabilité.
153 - les appétits de l'homme, sa volonté d'ignorer la réalité, conduit à *réduire sa perception*.
154 - christianisme comme une forme "d'anti-héroïsme". Bouddhisme comme une forme extrême (renonciation du monde etc)
156 - nous semblons incapables d'approcher le problème du mal humain du point de vue de la psychologie
157 - la psychanalyse est un autre système héroïque, une autre illusion.
158 - culpabilité fondamentale de l'homme, culpabilité d'exister. Exister sans savoir pourquoi, sans saisir de sens.
159 - si nous avons besoin d'illusions, comment pouvons nous les améliorer ?
161 - Herbert Marcuse sur la mort : les leaders agitent le spectre de la mort pour se rendre indispensables à la protection des masses
162 - la culpabilité existentielle est naturelle à l'homme, elle est fondamentale, c'est pas juste une névrose
Les idéologies cherchent toujours à réduire son importance, alors qu'il faudrait l'accepter pleinement pour la neutraliser, et l'exprimer de manière créative
163 - la connaissance de soi est la chose la plus dure pour l'homme, car elle révèle sur quoi se tient l'estime de soi : le déni de la mort et du statut de "créature". Le caractère est un mensonge vital qui recouvre les ambiguités douloureuses de l'homme "asticot-divin". L'homme nie à la fois le statut de créature et le statut de dieu pour avoir une vie tranquille dans le monde. Difficulté d'accepter sa physicalité + accepter sa divinité
L'idéal de sainteté est l'ouverture de la perception : c'est là que se rejoignent la science et la religion
164 - la société attaque toute entreprise de "sainteté" car elle pose un danger à son propre système d'héroïsme, même si celui-ci est devenu complètement immoral
165 - nous devrons oeuvrer à la fois contre les problèmes structurels et psychologiques qui empêchent la liberté
168 - conclusion : un corps scientifiques composés de chercheurs dans toutes les disciplines, travaillant en commun sur une théorie générale du malheur humain, révélerait à l'humanité les raisons qui mènent à l'auto-destruction, et montrerait que chaque société est un système héroïque qui contient une dramatiation du pouvoir et de l'expiation. Les hommes sont conduits à leur propre échec en cherchant la bonté et la pureté dans le monde. Si les hommes arrivent à s'affronter, à accepter en eux meme ce qu'ils ne veulent pas voir, ils ne chercheraient pas à détruire ce qu'ils ne veulent pas voir à l'extérieur.
Mais ce corps de scientifiques serait populaire et influent, et devient le bouc-émissaire parfait pour toutes les nations.
169 - nécessité d'un examen minutieux de ses peurs (animales) et des ses espoirs (de l'organisme, de l'égo). L'homme est une créature effrayée, qui cherche à vaincre ses limitations. Cela doit passer à la lumière et la raison doit l'analyser à froid.
170 - ce petit effort de conscience peut être le grain de sable qui perturbera l'irrationalité et la folie ambiante actuelle, menant à la destruction
 
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